jeudi 21 mars 2019

Esther est cachée


“Queen Esther,” 
by Edwin Long, 1878.


Esther est cachée ?

On nous dit d’Esther qu’elle est cachée. Qu’est-ce que ça veut dire ?

Il y a plusieurs explications, qui, si elles ne se recoupent pas, ne s’excluent pas pour autant, voire se complètent.

La première est donnée par le Talmud qui fait remarquer que le livre d’Esther est le seul livre de la Torah dans lequel le nom de Dieu n’apparait pas. Etonnant pour un livre biblique. Mais les rabbins nous disent : si le nom de Dieu n’apparait pas, c’est que Dieu est bien présent et qu’on peut suivre sa présence en filigrane  du texte.

D’ailleurs nous disent-ils, c’est ainsi que la bible le définit, Dieu est caché :

17 - En ce jour-là, ma colère s’enflammera contre lui. Je les abandonnerai, et je leur cacherai ma face. Il sera dévoré, il sera la proie d’une multitude de maux et d’afflictions, et alors il dira : N’est-ce point parce que mon Dieu n’est pas au milieu de moi que ces maux m’ont atteint
18 - Et moi, je cacherai ma face en ce jour-là, à cause de tout le mal qu’il aura fait, en se tournant vers d’autres dieux.
(Deutéronome 31 17-18)


Notons ici que le passage auquel nous renvoient les rabbins fait référence à l’idolâtrie et montre Dieu dans une grande colère parce que ses serviteurs se détournent de lui. Nous en reparlerons comme du prototype de la colère d’Assuérus et de celle d’Haman

Mais encore :

Vraiment, tu es un Dieu qui se cache Dieu d’Israël, sauveur (Isaïe 45,15)

Pourquoi, Seigneur, rejettes-tu mon âme ? Pourquoi me caches-tu ta Face ?(Psaume 88,15)

Mais aussi le Coran :

" Les regards des hommes ne l’atteignent pas… " " Il est " celui qui demeure caché. " " Il connaît parfaitement le mystère mais il ne montre à personne le secret de son mystère."[1]

Et c’est d’ailleurs ce que nous constatons : nous nous tournons vers la gauche : pas de Dieu. Nous nous tournons vers la droite : pas de Dieu ! Nous soulevons une pierre, nous scrutons les atomes, nous observons les étoiles : pas de Dieu !

Au point que quelques insensés affirment : il n’y a pas de Dieu, pas de Dieu, pas de Dieu.

Mais nous croyants, nous savons qu’Il est plus proche de nous que notre veine jugulaire, nous savons qu’Il guide son peuple lorsqu’il traverse le désert, nous savons que lorsque nous faisons le bien au plus petit d’entre nous, qu’Il Est, ici, parmi nous.

Alors évidement on peut se contenter de cette métaphore rabbinique qui veut que   " cachée " renvoie à la réalité métaphysique d’une présence divine qui se manifeste d’abord par l’absence, mais le texte nous dit que le qualificatif de " caché ", s’applique explicitement à Esther et non à Dieu lui-même.

Il s’applique parce qu’elle ne dévoile pas son vrai nom - Hadassa -, ni ses origines.

Elle est cachée à la fois à Assuérus et à Mardochée en étant enfermée au fond du harem.

Elle est cachée également par le fait que les commentaires talmudiques du livre d’Esther se nomment la Méguila d’Esther, méguila signifiant le dévoilement, la révélation.

Ainsi si Esther est voilée, c’est qu’elle va se dévoiler. Nous verrons alors que le livre d’Esther est aussi une prise de conscience.

Signalons que nous trouvons ici une nouvelle analogie avec la vierge Marie, mais cette fois-ci dans le Coran, elle y est décrite comme " cachée derrière un voile aux yeux des siens.[2] "

Donc pourquoi Esther est-elle cachée ?

Et bien simplement parce que le roi Assuérus a chassé la reine Vashti !
Avec l’expulsion de la reine Vashti du palais royal, c’est le principe féminin qu’elle représente qui est exclu. Il a été chassé sous la forme de la reine Vasthi, il réapparaitra sous la forme d’Esther. D’ici là il est caché aux yeux du roi.  Il faut croire ici en ce que nous dit la table d’émeraude : " tout ce qui est en haut est semblable à ce qui se passe en bas ",  proposons donc qu’il s’agit du même mouvement, celui qui occulte la part féminine et celui qui nous rend étranger à notre nature primordiale,   celle de notre origine divine. Nous perdons ensemble, la femme en nous et la vision de la divinité.
Et le roi, entouré de son conseil de sage, bande de vieux barbus raisonnant et prétendant que " le roi doit être le maître en sa maison ", se retrouve bien seul en son palais, au point qu’il doive se chercher une nouvelle épouse !
Mais la rencontre avec Esther, même lorsqu’il lui pose une couronne sur la tête, ne peut être comprise comme un véritable mariage, tout au plus des fiançailles. Tant que n’est pas accompli la promesse qu’il lui fait " je te donnerai la moitié de mon royaume " et qui sera le signe de l’union véritable.

mercredi 20 mars 2019

Samson et la fin des temps


Partie 1 - Samson

Certains commentateurs ont fait remarquer que Samson préfigure le 11 septembre dans le premier attentat suicide de tous les temps.
En effet, prisonnier des Philistins, Samson écroule les deux colonnes du temple, entrainant la mort de 3000 personnes.

Que je meure avec les Philistins ! clamera-t-il.

Prenant appui sur les deux colonnes principales du temple, bras écartés en position christique.

Cette dernière image renforcée par ce mystérieux évènement qui se produisit après la crucifixion : 

Jésus poussa de nouveau un grand cri, et rendit l'esprit. Et voici, le voile du temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu'en bas,  (Matthieu 27:51)


Samson est aussi le fruit d'un héritage, il est issu de la tribu de Dân et pèse sur lui la malédiction de Jacob : 
 Dân jugera son peuple, comme l’un des rameaux d’Israël. Dân sera un serpent sur la route, une vipère sur la voie, qui mord les talons du cheval: son cavalier tombe en arrière. J’espère ta salvation, IHVH-Adonaï !

 or Dieu avait averti : 

 L'Eternel Dieu dit au serpent: Je mettrai l'inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité: celle-ci t'écrasera la tête, et tu lui blesseras le talon.

Le serpent dont parle Jacob est "kérastère", sorte de vipère à corne, image de Satan. Ce qui nous oriente vers une lecture anté-christique de Samson.

Aussi, Jérémie en rajoute une couche au sujet de la destinée des Dân dans une coloration tout à fait apocalyptique :

"Pourquoi restons-nous assis? Rassemblez-vous, et allons dans les villes fortes, pour y périr! Car l'Eternel, notre Dieu, nous destine à la mort, Il nous fait boire des eaux empoisonnées, parce que nous avons péché contre l'Eternel. Je veux en finir avec eux, dit l'Eternel; Il n'y aura plus de raisins à la vigne, Plus de figues au figuier, Et les feuilles se flétriront; Ce que je leur avais donné leur échappera. Nous espérions la paix, et il n'arrive rien d'heureux; Un temps de guérison, et voici la terreur! - Le hennissement de ses chevaux se fait entendre du côté de Dan, Et au bruit de leur hennissement toute la terre tremble; Ils viennent, ils dévorent le pays et ce qu'il renferme, La ville et ceux qui l'habitent. Car j'envoie parmi vous des serpents, des vipères à cornes, Contre lesquels il n'y a point d'enchantement; Ils vous mordront, dit l'Eternel."

Revenons à notre temple et à ses colonnes, nous savons ce qu'elles sont à travers Salomon et son architecte Hiram. 
Elles sont sexuées. Nous le savons à la façon dont Hiram les mesure : par la hauteur pour le mâle, par la circonférence pour la femelle. Nous savons également leurs proportions puisqu'elles sont identiques  et que nous connaissons, donc, leur hauteur et leur circonférence.
Ces deux caractéristiques se trouvent sur le WTC, puisque la tour Nord, possédait une très haute antenne formant phallus et que les tours respectaient les proportions des colonnes du temple de Salomon.
Les deux colonnes du temple représentent la séparation du principe masculin et du principe féminin qui forme le socle sur lequel repose notre humanité. Socle dont on voit qu'il est constamment brisé par des règles de plus en plus absurdes.

Un autre détail est à relever puisque Pr. François Roby nous a expliqué (http://aitia.fr/erd/physique-ordinaire-de-lextraordinaire/ ) l'origine nucléaire de la démolition des tours.

Les israéliens, ceux d'aujourd'hui, se revendiquent de Samson et appellent ainsi, sous le nom "d'option Samson", la doctrine de dissuasion nucléaire de l'état d'Israël. Ce n'est peut-être pas un hasard si le centre de recherche nucléaire israélien mise en place dans le cadre du programme  Atoms for Peace, se nomme Nahal Soreq : du nom de la vallée où Samson rencontre Dalila.

L'option Samson c'est la politique de la terre brulée en pire : Si nous mourrons, vous mourrez avec nous, c'est aussi l'absence de proportionnalité : je reçois un, je renvoie 10, et c'est encore la menace élargie. C’est-à-dire une menace qui ne se dirige pas seulement vers l'agresseur mais également ceux qui l'entourent ou ceux qui le défendent, au final une menace étendue au reste du monde, c’est-à-dire ne pas exclure de tout détruire. 



On dira que c'est très bête comme état d'esprit, mais c'est ce qui arrive à ceux qui s'identifient à Samson.




mardi 19 mars 2019

La Reine Esther

La reine Esther
Minerva Teichert, 1939


Esther

Il y a dans la bible trois femmes essentielles, il s'agit d'Hagar, d'Esther et de Marie.
Esther est sans doute la synthèse des deux autres.

Qui est Esther ?
Nous trouvons Esther quand elle est en âge de se marier. Elle devint orpheline et fut prise sous la tutelle de son cousin Mardochée, qui en fit sa servante.

Lorsque son tour d’aller vers le roi fut arrivé, Esther, fille d’Abichaïl, oncle de Mardochée qui l’avait adoptée pour fille, ne demanda que ce qui fut désigné par Hégaï, eunuque du roi et gardien des femmes. Esther trouvait grâce aux yeux de tous ceux qui la voyaient.

Ce verset dépeint le caractère d’Esther, elle est innocente et pure, ne cherche pas à paraître, se contente de l’obligatoire et rejette le superflu, tout artifice de séduction, d’un naturel qui laisse le charme de la grâce émaner d’elle. Elle est vierge. Le conte ne le dit pas, mais si elle est destinée à être l’épouse du roi, elle l’est certainement.

Le texte nous dit :

Il élevait Hadassa, qui est Esther

Bien que le nom Esther soit babylonien, Esther aurait le sens de caché.
Esther est un qualificatif, son véritable nom est Hadassa, ce qui en Hébreu signifie la Myrte.la myrte est le symbole de Vénus. Vénus est la déesse de l’amour, de la séduction et de la beauté :

La jeune fille était belle de taille et belle de figure.
Le roi aima Esther plus que toutes les autres femmes, et elle obtint grâce et faveur devant lui plus que toutes les autres jeunes filles.

Wikipédia, nous dit que Vénus dérive entre autre de la déesse babylonienne Isthar.
Isthar,  Esther ?
Le nom serait en rapport au mot "astre" comme en témoigne l'étymologie de celui-ci :

Provenç. astre ; espagn. et ital. astro ; de astrum ; angl. star ; allem. Stern ; grec ἄστρον ; persan, stare ; zend, astu ; sanscrit védique, strĭ. Tous ces mots sont fondamentalement les mêmes, et paraissent se rapporter à un radical sanscrit str, qui signifie disperser : de sorte que les astres sont la dispersion, la dissémination.


On y apprend qu’Isthar était déesse de l’amour physique et de la guerre, régissait la vie et la mort. On verra qu’il s’agit aussi d’une particularité d’Esther puisque c’est elle qui organise le massacre des ennemis. Une particularité partagée par Aphrodite. 
L’origine divine d’Esther est encore confirmée par le rêve de Mardochée :

J’ai vu une source minuscule qui est devenue un fleuve ; puis de la lumière, du soleil et beaucoup d’eau. Le fleuve, c’est Esther que le roi a épousée et qu’il a faite reine.
La " source minuscule " représente l’Un origine de toutes choses.
Elle est aussi orphéline, or pour Jung l’orphelin est symbole de la pierre philosophal.
Parmi les autres attributs qui peuvent être associés à Esther, il y a son rôle de médiatrice, entre Mardochée et Assuérus, et son rôle de conseillère : le roi l’écoute. En ce sens elle est sagesse, la Sophia éternelle.
Dans la tradition chrétienne, Esther est souvent associée à l’église. Parce que l’Eglise est l’épouse du Christ. Elle est également associée à la vierge Marie.
De nombreux traits pourraient être relevés ici, Marie, reine du ciel, intercédrice, vierge et épouse, lumineuse et revêtue d’une couronne, elle terrasse le dragon.
Nous voyons donc qu’Esther n’est pas une simple prophétesse mais bel et bien une divinité.
Qu’Esther soit considérée comme une déesse entraine  qu’Assuérus l’est aussi.  Ce que ne niera pas le Talmud puisqu'il affirme qu'Assuérus compense l'absence de Dieu de cette histoire.
Leur mariage n’est alors pas un simple mariage mais un Hiéros gamos, une union divine.

Le mariage du Roi et de la Reine Esther est à mettre en perspective avec le dogme de l'Assomption :

« la Vierge immaculée, préservée par Dieu de toute atteinte de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l'univers, pour être ainsi plus entièrement conforme à son Fils, Seigneur des seigneurs, victorieux du péché et de la mort »

Que ces personnages soient pris pour des divinités ne signifie pas qu’ils soient des dieux mais qu’il faille les considérer comme des archétypes au sens Jungien, c’est à dire des instances psychiques autonomes dont le fonctionnement se déroule en arrière-plan de la conscience.

Samson et les portes de Gaza. Visite à Hébron.

     Samson et les portes de Gaza. Visite à Hébron. Avant que Samson n'écroule les colonnes du temple, préfaçant les attent...